Tibet sans retour

Chao Wang

Résumé : La nouvelle littérature chinoise semble découvrir les classes moyennes et, par-là même, le héros moyen. Histoire sans femme, c'est ici une nouvelle d'apprentissage de deux jeunes hommes, originaires du Sud, dûment diplômés dans des universités de Pékin et non moins dûment ratés. Tous deux ont choisi l'Art, l'un (Zhao Jie), la danse et la chorégraphie, l'autre (Li Yi), la peinture. Or, dans la Chine de l'OMC, c'est déjà choisir l'échec : le ballet du chorégraphe sera un fiasco, quant au peintre, reconverti dans les affaires, il gagnera beaucoup d'argent mais y perdra son âme.
Tous deux, par un beau dimanche de bobos - le peintre a une voiture française et se rend, chaque week-end, avec son ami d'enfance, dans un bowling - vont se retrouver impliqués dans un accident de la route où un misérable trouvera la mort : les voilà, l'un et l'autre, coupables à jamais, obsédés par la mort d'un gamin, de ceux qu'on rencontre aux feux rouges, ou dans les embouteillages, payés pour glisser aux conducteurs des prospectus publicitaires. Les voilà, l'un et l'autre, condamnés au remords, donc à l'échec ou à la fuite. Mais, dans la Chine que le fric peu à peu corrompt, il existe un espace rédempteur, à condition de ne pas en revenir, c'est le Tibet.
L'un y mourra, enseveli sous la neige libératrice, après avoir entendu, dans un monastère perdu, le son sublime des cloches ; l'autre partira à sa recherche, en quête d'un supplément d'âme.

Source : Bleu de Chine