Au salon " Noir sur la Ville " de Lamballe
(22), j'avais rendez-vous avec Francis
Mizio, auteur de Domo Dingo
et récemment paru chez J'ai Lu. Je dois dire que je n'étais
pas trop fier tant j'étais impressionné. Tout de suite, les
présentations faites, il me mit à l'aise et c'est autour d'un café
que l'on a discuté. Voici cet entretien - raccourci - tant
on avait de questions à poser et de réponses à donner - et de choses
à dire sur ce livre..
Ce que j'aime bien dans ce
livre c'est que l'on peut le lire à deux degrés différents.
Au premier comme un bon roman de science-fiction polar, au
second comme un critique de l'évolution de la société.
Francis Mizio : C'est gentil, c'est ce que je voulais
faire ressortir. Pouvoir, de manière ludique informer les
gens sur l'évolution de la société sans prendre partie. Laisser
les gens se faire leur propre opinion.
C'est une manière de se moquer des raccourcis que de faire
des sigles à rallonge ?
F.M. : Le film qui m'a le plus influencé, c'est Brazil
de Terry Gilliam qui est dans un monde absurde, hyper bureaucratique,
une espèce d'exagération du monde actuel, un monde en proie
à la technologie, l'obsession de l'information et du
formulaire. On est constamment confronté à des formulaires
et si tu ne connais pas la clé, tu es largué. J'aime bien
ricaner avec ça ! Plus le sigle et long et imbitable, mieux
c'est.
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Domo
Dingo - J'ai Lu
n°5607
217 Pages - 2000
ISBN : 2290303135
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Y'a pas mal de faits de société
que tu relates dans ce livre. C'est tout ton travail de journaliste
derrière toi qui revient ?
F.M. : Pour Domo Dingo, c'est directement lié à mon
activité. Quand j'étais journaliste, j'étais un des premiers à parler
d'Internet dans les journaux grand public autrement que technique
en traitant l'aspect social et sociétal. (Bien qu'ayant quitté
Libération, il a actuellement toujours une chronique qui s'appelle
" Surfe Mamie, surfe ", l'Internet expliqué à mamie de manière burlesque.)
Pendant que j'étais journaliste, il y a plein de choses que je voulais
dire mais ce n'était pas directement lié à l'actu, c'était
plutôt un travail de recul, un regard subjectif de l'actu,
de ce qui se fait, et en journalisme, il n'y a pas la place pour
ça. J'ai continué d'accumuler les conneries que j'ai lu dans les
bouquins de Negroponte, de Dertouzos et les grands pontes du M.I.T.
(Massachusetts Institute of Technology) pendant quatre ans.
Je me suis dit qu'un jour je donnerai mon avis, ce que je pense
de tout ça parce qu'écrire dans Libé ne me donnait pas la possibilité
de délirer autour de ça. J'ai fait un mix de fiction et de collecteur
de presse. Les autres bouquins que j'ai écrit sont souvent tirés
de faits d'actualité ou de société mais ne sont pas directement
liés à mon vécu personnel.
C'est en fait un mix entre polar et S.F.
F.M. : La S.F. prend un truc du présent, en fait une hypothèse
et la pousse à son extrémité, le polar se contente de regarder ce
qu'il y sous les tapis ou derrière la façade mais ce ne sont que
des manières de décrypter le présent. L'intrigue sert à servir un
propos, c'est de la mise en scène pour pouvoir donner un point de
vue au lecteur et lui donner des éléments de réflexion. La fiction
permet de mettre en scène et de porter un propos et de le servir
et le lecteur se débrouille. J'essaye en tout cas de ne pas être
moraliste.
J'aime bien les voix off entre les chapitres, le contraste entre
réalité et fiction te montre en fait que cette fiction n'est pas
si loin de la réalité !
F.M. : Ça a deux rôles. C'est un rôle de pédagogie. Il y
a des gens qui vont peut-être lire Domo Dingo et qui n'ont jamais
entendu parler de cyberculture, d'Internet… Ça leur permet de faire
le lien entre pourquoi cette fiction, alors que dans la presse,
on nous propose des fictions qui sont présentées comme des choses
très sérieuses et qui servent en fait à faire une propagande mercantile
ou proposent des choix de société. La S.F. est un genre qui est
extrêmement utilisé par les gens qui font de la propagande ou les
publicitaires comme (" la fée électricité…"). La deuxième chose,
c'est montrer le décalage entre fiction et ce qui est considéré
comme le réel n'est pas si loin. Qu'on nous trompe. (…) On est dans
un monde où il y a trop de réalités dans le sens où il y a un torrent
de misères du monde qui nous arrive, on est absorbé par ça. La virtualité,
monde imaginaire de la pub, des médias, etc, ont imprégné la réalité.
Le fait de mettre ces choses là dans un média lent, le livre par
rapport à un média rapide, la télévision, permet de faire ressortir
tous les sens cachés de toutes les images subliminales.
Une des choses qui m'ont amusé, c'est le contraste entre
le fait de critiquer la domotique et le fait que la majeure partie
de tes recherches se sont faites par le biais d'Internet !
F.M. : Ce que je veux dire, c'est qu'il ne faut pas se laisser
bouffer par ça. Ce n'est pas à nous de nous adapter à la technologie
mais le contraire. Je peux très bien me servir de tous les moyens
technologiques pour écrire un bouquin pour dire que la technologie
n'est pas bien. Mais il ne faut pas qu'on soit asservi à ça. Le
paradoxe est gérable. Plus je me servirai d'un outil, plus j'en
connaîtrais les limites et les dangers.
D'où t'es venu l'histoire des tâches solaires ?
F.M. : C'est un fait réel. Les irruptions solaires
créent des orages magnétiques. Il y en a eu il y a 2, 3 ans. C'est
étudié très sérieusement parce que ça perturbe le fonctionnement
informatique. Or on est dans un monde de plus en plus informatisé.
Il suffirait d'un orage magnétique très fort pour que les ordinateurs
se mettent à déconner. Dans ce cas là, tu ne peux plus rien faire.
Le nom de Vijayantchimala, ça vient d'où ?
F.M. : Ça, c'est fait exprès. Dans le roman populaire, Il
y a obligatoirement une scène de cul. Moi, les miennes, elles sont
invraisemblables, je fais exprès qu'elles soient invraisemblables.
Il y a autre chose qui m'énerve ce sont les prénoms stéréotypés
américains. J'ai un dictionnaire des prénoms et je l'ouvre au hasard.
Je fais exprès de mettre des prénoms de culture étrangère parce
qu'on est dans un monde de mixité. Mais sinon, Vijayantchimala existe
vraiment et veut dire guirlande de joyaux en hindi. C'est pareil
pour les nanas au corps de rêves : mes héroïnes ne correspondent
pas aux canons en vogue, je prends le contre-pied systématique.
Voilà. Et bien merci. C'est vraiment gentil à toi de m'avoir
consacrer du temps.
F.M. : De rien. Bonne continuation.
Benjamin DUQUENNE
Bibliographie :
Agence
tous tafs - Flammarion
La
vie ultramoderne - Baleine, Macno
Les
hommes préfèrent les sondes - Baleine, Série
Grise
Privés
de futur : 24 récits de polar-sf
Tout
ce qui tombe du ciel - Lignes noires
Un
quart d'heure pas plus et autres nouvelles - Librio
La
santé par les plantes- Série noire
En savoir plus sur Francis MIZIO
Interview chez 00h00 :
http://www.00h00.com/html/news/mizio_inter_130899/anim.html
Son site personnel :
http://www.mizio.fr.fm/
Présentation de son livre chez j'ai Lu :
http://www.jailu.com/book.asp?num=5607
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